Quand le Serpent s’enroule autour de 2025 : traditions et contes folkloriques 🐍

Le Serpent dans le Folklore et l’Imaginaire Japonais : Entre Crainte et VĂ©nĂ©ration

Le serpent (hebi – 蛇) occupe une place singuliĂšre dans la culture japonaise, oscillant entre crainte et respect profond. TantĂŽt gardien des eaux, figure protectrice et symbole de fertilitĂ©, tantĂŽt crĂ©ature menaçante et rusĂ©e, il incarne une ambivalence fascinante qui se reflĂšte dans les contes, les lĂ©gendes et les lieux sacrĂ©s du Japon.

Nishizawa Tekiho, Unai no mono (うăȘいぼべも), 1924, BibliothĂšque nationale de la DiĂšte (ć›œç«‹ć›œäŒšć›łæ›žé€š).

Le Serpent Protecteur : Symbole de Fertilité et de Prospérité

Dans certaines croyances rurales, le serpent est associĂ© aux divinitĂ©s de l’eau et de la rĂ©colte. Il est parfois vu comme le messager des kami (divinitĂ©s shintoĂŻstes), capable de protĂ©ger les foyers et les terres agricoles. Par exemple, dans la prĂ©fecture de Kumano, les temples dĂ©diĂ©s Ă  Benzaiten (dĂ©esse de l’eau, de la musique et de la sagesse) honorent souvent les serpents blancs, considĂ©rĂ©s comme ses messagers.

Dans les croyances populaires, il est aussi associĂ© Ă  la protection, surtout dans les sanctuaires shintoĂŻstes oĂč des statues de serpents sont parfois utilisĂ©es pour Ă©loigner les mauvais esprits.

De la mĂȘme maniĂšre, dans certains contes folkloriques japonais, un serpent prend la forme d’un jeune homme ou d’une fille pour devenir le partenaire d’un humain et l’aider Ă  surmonter son quotidien pĂ©nible. Cependant, un humain et un animal fantastique ne peuvent vivre Ă©ternellement heureux et survient un malheur (souvent provoquĂ© par l’humain et sa curiositĂ©) qui renvoie l’animal dans son monde, laissant l’humain et sa progĂ©niture au dĂ©sespoir (par exemple dans le conte “Le serpent du ciel”)1. D’autres fois, c’est un serpent Ă©levĂ© par un couple d’humains mais sa forme et sa nature profonde l’empĂȘchent de s’intĂ©grer vraiment au monde des humain et il finit par se sacrifier pour garantir la prospĂ©ritĂ© du couple qui l’avait recueilli (voir le conte “Haze, le serpent reconnaissant”)2. Il existe aussi des versions oĂč c’est l’humain qui dĂ©cide de renoncer Ă  son monde par amour et Ă  rejoindre le serpent dans son Ă©lĂ©ment aquatique (par exemple dans le conte “La mare Ă  Oyoshi”)3.

  1. BIHAN-FAHOU Françoise et SHINODA Chiwaki, traduit du japonais et prĂ©sentĂ© par, “De serpents galants et d’autres”, Ă©d. Connaissances de l’Orient, Gallimard, 1992, p.180-181.
  2. BIHAN-FAHOU Françoise et SHINODA Chiwaki, traduit du japonais et prĂ©sentĂ© par, “De serpents galants et d’autres”, Ă©d. Connaissances de l’Orient, Gallimard, 1992, p. 191-192.
  3. BIHAN-FAHOU Françoise et SHINODA Chiwaki, traduit du japonais et prĂ©sentĂ© par, “De serpents galants et d’autres”, Ă©d. Connaissances de l’Orient, Gallimard, 1992, p.244-247.

Le Serpent Malveillant : Créature de Défi et de Destruction

À l’opposĂ©, certaines lĂ©gendes prĂ©sentent le serpent comme une crĂ©ature redoutable. L’exemple le plus emblĂ©matique est celui de Yamata no Orochi, un serpent Ă  huit tĂȘtes et huit queues qui terrorisait le pays d’Izumo avant d’ĂȘtre terrassĂ© par le dieu Susanoo. On trouve la description de ce monstre Ă  huit tĂȘtes dans le Kojiki (Receuil des faits anciens, 712, ouvrage marquant le dĂ©but de la littĂ©rature japonaise) et le Nihon shoki (Annales du Japon, 720) il a “huit queues et huit tĂȘtes, ses yeux sont rouges comme des physalis, et il exhale un souffle venimeux semblable Ă  des flammes. Son corps s’étend sur huit vallĂ©es et huit montagnes. Sur son dos poussent de la mousse, des cĂšdres et des cyprĂšs. Tout le long de son ventre est parcouru de riviĂšres de sang, et ses chairs sont constamment incandescentes”1. Ce mythe raconte Ă  la fois la dangerositĂ© du serpent et le pouvoir hĂ©roĂŻque de ceux qui osent l’affronter.

Hors de la mythologie, la figure du serpent comme figure malĂ©fique est souvent prĂ©sente dans les contes folkloriques. Pour exemple les contes “Le serpent Ă©pinglĂ©â€(pp. 231-232) et “Le serpent samouraï” (pp.233)2.

Katsushika Hokusai, Obsession (しうねん), vers 1830.

Dans le monde de l’art, la figure du serpent est souvent utilisĂ©e pour sa forme facilement changeante, mais aussi pour son potentiel dramatique. Dans l’image ci-dessus, le serpent reprĂ©sente la jalousie obsessive qui l’on dit perdurer aprĂšs la mort. C’est pour ça que les esprits des femmes jalouses (trĂšs prĂ©sentes dans les histoires populaires) qui viennent hanter leur amant, sont souvent reprĂ©sentĂ©e sous forme de serpent. Ici il enlace une tablette funĂ©raire placĂ©e Ă  cĂŽtĂ© d’offrandes.3

Le serpent est donc souvent perçu comme une créature à la fois puissante et redoutée, mais aussi capable de transformation, un symbole de renouveau et de changement.

  1. JOLLIVAT Sylvain, Esprits et crĂ©ature du japon : rencontres Ă  l’heure du boeuf, Ă©d. You Feng, p.12.
  2. Toujours tirĂ© du recueil “De serpents galants et d’autres” traduit du japonais et prĂ©sentĂ© par BIHAN-FAHOU Françoise et SHINODA Chiwaki, Ă©d. Connaissances de l’Orient, Gallimard, 1992.
  3. https://publicdomainreview.org/collection/hokusai-s-ghost-stories-ca-1830/

2025 – annĂ©e du serpent

L’annĂ©e 2025 est placĂ©e sous le signe du Serpent dans l’astrologie chinoise. Dans cette tradition, chaque signe du zodiaque est associĂ© Ă  une sĂ©rie de qualitĂ©s et d’influences qui marqueront l’annĂ©e. Le Serpent est souvent perçu comme un symbole de sagesse, de discrĂ©tion et de rĂ©flexion. Les personnes nĂ©es sous ce signe sont souvent vues comme mystĂ©rieuses, astucieuses et dotĂ©es d’une grande intuition. En 2025, ces caractĂ©ristiques seront renforcĂ©es, incitant Ă  une pĂ©riode de rĂ©flexion profonde et de prudence dans les choix Ă  venir.

Mi et Hebi, deux kanji diffĂ©rents pour un mĂȘme animal

En japonais, le mot “Serpent” peut ĂȘtre exprimĂ© de deux façons principales : hebi (蛇) et mi (ć·ł). Bien que ces deux termes dĂ©signent le mĂȘme animal, leur utilisation diffĂšre. Le terme mi (ć·ł) est spĂ©cifiquement utilisĂ© pour dĂ©signer l’annĂ©e du Serpent dans le zodiaque chinois et japonais, alors que hebi (蛇) est utilisĂ© dans la langue courante.

Pourquoi ne pas utiliser le kanji hebi (蛇) pour ce contexte ? Le kanji mi (ć·ł) est un caractĂšre plus ancien et fait partie des douze signes du zodiaque traditionnel chinois et japonais, reprĂ©sentant les annĂ©es et non simplement l’animal en soi. Le choix de mi renvoie ainsi Ă  une tradition plus ancrĂ©e dans les croyances chinoises et japonaises, oĂč chaque animal du zodiaque est liĂ© Ă  un cycle astrologique.

Je te souhaite donc une excellente annĂ©e sous le signe du serpent et me rĂ©jouis de te retrouver au dĂ©tour d’une future activitĂ©, en ligne ou en prĂ©sentiel.

Kƍno Bairei, Serpent, in Bairei gakan, vers 1890.



















Si les signes du zodiaques japonais t’intĂ©ressent, tu peux aller lire mon article sur le signe du lapin.











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(C) Le Japon avec Andrea