Une question d’honneur, le Chūshingura ou la légende des 47 rônins (2/5): intrigue et faits historiques.

Des faits historiques à la légende

Avant de résumer l’intrigue, si tu souhaites lire les aventures des 47 rônins dans leur intégralité je te conseille le livre “Les 47 rônins, le trésor des loyaux samouraïs” de George Soulié de Morant chez Budô Editions (2006).

Tout commence lors d’un incident pendant les préparatifs en vue d’une cérémonie pour un envoyé impérial. A cette occasion, le chef des rites Kira Kôsuke no Suke, un lâche arrivé à son statut grâce à l’argent et non pour ses qualités, insulte le jeune daimyô (seigneur guerrier) Asano Takumi no Kami en insinuant qu’il est incapable d’effectuer les rites nécessaires (alors que c’est faux).

Asano provoque donc Kira en duel et dégaine son sabre.

Kira s’enfuit, tel le lâche qu’il est, et Asano qui le poursuit le blesse.

Sous le régime des Tokugawa, les shogun en place à l’époque Edo, il est formellement interdit de dégainer son sabre dans le palais. La punition infligée aux contrevenants est la mise à mort par éventrement traditionnel, le seppuku.

Asano, bien que jeune et intrépide, se soumet à l’ordre. A sa mort, ses fidèles samouraïs se retrouvent sans maître : ils deviennent des rônin (浪人) ou “homme sur les vagues”.1

浪 ろう (rou) = la vague

人 にん (nin) = la personne

Les rônins sont donc des samouraïs sans attache, dérivant sans but, des vagabonds, l’ombre d’un samouraï. N’ayant ainsi plus rien à perdre, ces 47 rônins sans raison d’être (protéger leur seigneur) n’ont plus qu’une obsession : venger la mort injuste de leur maître.

C’est une expédition difficile. Ça va leur prendre une année entière car ils doivent d’abord simuler l’indifférence face à la mort de leur chef, trouver un plan, mettre toutes les chances de leur côté, tout en endurant les moqueries de tous.

C’est surtout l’occasion de présenter et de venter les prouesses de chacun de ces guerriers aux talents spécifiques grâce à une succession d’épisodes plus ou moins rocambolesques. Nous y reviendrons dans l’article consacré à la représentation de ces rônins.

Ogata Gekko, Chûshingura : Muramatsu Kihei Hidenao, estampe, entre 1895 et 1903

Ils finiront donc par prendre d’assaut le pavillon de Kira par une froide nuit de décembre. Par souci de justice, les rônins offrent à Kira la possibilité de s’éventrer comme un brave, mais celui-ci est lâche jusqu’au bout et se dérobe, forçant les rônins à l’exécuter.

Le shogun n’intervient pas directement, car d’autres daimyô interviennent en leur faveur : ils ont réparé une injustice et ont même laissé à Kira une porte de sortie honorable qu’il a été incapable de saisir.

Les rônins seront tout de même condamnés au seppuku pour avoir porté la main sur un représentant du pouvoir (l’avoir tué et avoir incendié son palais).

Le seppuku est une mort honorable pour un samouraïs. La mort la plus honorable bien sur est celle rencontrée sur le champ de bataille, protégeant son clan et son seigneur, mais à défaut, la mort par rituel seppuku reste un privilège.

Les 47 rônins se rendent donc au temple Sengakuji2, là où repose leur maître. Il lui présente la tête de l’ennemi vaincu puis, après avoir reçu l’ordre de condamnation officielle, s’éventrent.

46 seulement s’éventre, car un des rônins a été désigné pour leur survivre et effectuer les rites funéraires appropriés et raconter leur histoire.

“Ils sont morts, mais leur mémoire ne périra jamais, car tous les cœurs, même les plus vils, ont admiration et respect pour les nobles sentiments qui, seuls, élèvent l’homme au-dessus de la bête.”3

Dans le prochain article, tu découvrira comment cette légende reste vivace et honorée notamment via le temple Sengakuji.

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Notes

  1. SOULIE DE MORANT George, Les 47 rônins, le trésor des loyaux samouraïs, Budo éditions, 2006, p. 26.
  2. Le Sengaku-ji se trouve à Tokyo : 〒108-0074 2-11-1 Takanawa, Minato-ku, Tokyo. Site web officiel (en).
  3. SOULIE DE MORANT George, Les 47 rônins, le trésor des loyaux samouraïs, Budo éditions, 2006, p. 171.

Couverture: Utagawa Hiroshige, Chūshingura (忠臣蔵), Acte XI , épisode 5, Le repli sur le pont Ryōgoku, (Youchi yon, Ryōgoku hikitori), estampe ukiyoe, 1836.

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